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Éric CHEVILLARD – Palafox

Pourquoi le niveau littéraire est-il le moins accessible à qui s’engage dans l’étude d’une langue ?
Parce que la langue, n’y ayant de compte à rendre qu’à elle-même, y entretient un rapport des plus lâches avec le référent. Le monde qui se déploie sous les plumes en capte toutes les irisations, mais s’isole du monde réel pour accéder à son autonomie, son autarcie. À son autisme : la langue y joue en cercle presque fermé.
Les littératures d’Europe de l’Est sont familières de cette économie du roman, défichée de celle d'un monde réel négligé comme instance de rendement et de vraisemblance. Et si Kafka est si kafkaïen, c’est que son monde a son autonomie comme monde d’un langage qui fonde quasi seul sa propre vraisemblance. Dès Kafka, c’est le langage qui fut à l’œuvre dans les littératures d’Europe, tel qu’il l’est encore aujourd’hui.
Avec son génie pétillant, Éric Chevillard poursuit à sa manière une œuvre de langage. Son Palafox, sans autre compte à rendre qu’à la syntaxe, se métamorphose et prend les formes abstraites et labiles du langage (on pourrait dire que Palafox se coule – se vautre – dans le langage qui lui confère sa souplesse). C’est la langue qui joue, en pleine intelligence d’elle-même, avec ses polysémies, ses homophonies, ses carcans. Fictions taillées à même la langue ; phrases au format d'une poétique surréaliste.
Par maintes chevilles fichées dans la langue et qui fixent un récit tenté par la volatilité, Éric Chevillard restera difficile à traduire.
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